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Mondes politiques
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Présentation
Les mondes politiques contemporains ont donné lieu à des théorisations très hétérogènes : espace autonomisé et professionnalisé de gouvernement des conduites (Weber, Bourdieu), lieu réflexif de mise en ordre du social (Touraine, Rosanvallon), forme institutionnalisée de définition des amis et des ennemis (Schmidt, Freund), etc. Dans toutes ces définitions, ressort néanmoins l’idée d’une forte différenciation du politique, considéré comme un espace assez autonomisé des autres formes du social (jusqu’à être enchâssé dans un champ), ainsi que d’une cohérence de cet univers, assurée autour d’un bien central (le pouvoir des pouvoirs), de ses moyens spécifiques d’action dont le droit et la coercition, d’une forme de justification (la légitimation dans ses trois formes idéales-typiques : charisme, tradition et légalité rationnelle) et de types d’institutions et d’acteurs particuliers (car très professionnalisés).
Le renouvellement des mandats par l’élection à périodicité fixe confère au champ politique une dimension particulière : son autonomie ne peut être que relative. Parler de mondes politiques contemporains, au pluriel, vise donc en premier lieu à réinterroger ces postulats de différentiation et de cohérence, à explorer les fondements de l’intégration et à prolonger ou contester ces définitions. Il s’agirait ainsi de réfléchir aux formes d’hybridation et d’hétéronomie qui travaillent, en externe, les univers politiques et qui tendent à les pluraliser : importation de grandeurs liées à d’autres espaces sociaux (la « proximité », « l’efficacité managériale », etc.), investissements d’acteurs porteurs de savoirs et de compétences non explicitement politiques, équipement par des objets sociotechniques issus des univers de l’ingénierie sociale, confrontation aux logiques et aux valeurs portées par de nouveaux auxiliaires du champ politique (sondeurs, conseillers en communication, experts, économètres…) comme des champs journalistique et intellectuel, etc.
Le renouvellement des mandats par l’élection à périodicité fixe confère au champ politique une dimension particulière : son autonomie ne peut être que relative. Parler de mondes politiques contemporains, au pluriel, vise donc en premier lieu à réinterroger ces postulats de différentiation et de cohérence, à explorer les fondements de l’intégration et à prolonger ou contester ces définitions. Il s’agirait ainsi de réfléchir aux formes d’hybridation et d’hétéronomie qui travaillent, en externe, les univers politiques et qui tendent à les pluraliser : importation de grandeurs liées à d’autres espaces sociaux (la « proximité », « l’efficacité managériale », etc.), investissements d’acteurs porteurs de savoirs et de compétences non explicitement politiques, équipement par des objets sociotechniques issus des univers de l’ingénierie sociale, confrontation aux logiques et aux valeurs portées par de nouveaux auxiliaires du champ politique (sondeurs, conseillers en communication, experts, économètres…) comme des champs journalistique et intellectuel, etc.
Un second axe d’interrogation, que pourront explorer les projets qui soumettront à cette opération, correspond à la réflexion sur les mécanismes de conjugaison, en interne, des différents mondes du politique (Simmel, Weber, Bourdieu). Les études en termes d’aires culturelles, mais aussi plus largement celles qui intègrent la dimension territoriale, les rapports entre logiques sectorielles et logiques territoriales, les phénomènes cognitifs, rentrent dans cette perspective. Si celle-ci a longtemps été confondue avec le fonctionnalisme (Parsons) voire le néo-fonctionnalisme (Luhmann), elle ne s’y réduit pas et il est sans doute temps également de se repencher sur ces courants dont la portée scientifique a toujours été diversement appréciée en Europe et dans le monde anglo-saxon. Il s’agira donc d’inviter à croiser des perspectives sur le politique qui restent bien trop souvent cloisonnées : sociologie de l’action publique, sociologie des mobilisations, sociologie de l’expertise, sociologie des médias, sociologie du personnel politique et administratif, sociologie électorale, sociologie du jugement politique, etc. L’idée sera de voir si de nouvelles formes de division du travail s’instaurent entre les différents acteurs spécialisés du politique, centraux comme auxiliaires, ou bien même si la réalité du travail politique n’obéit finalement que peu à une répartition claire des tâches et des savoirs mobilisés.
Un troisième axe concerne la question de l’historicité du politique. Il s’agira de rappeler, contre les idéologies amnésiques de la rupture promues par le New Public Management, que l’histoire (même longue) structure fortement les représentations comme les choix politiques (que cela s’exprime dans la littérature savante par des « sentiers de dépendance » ou des « cultures politiques ») et que les acteurs et groupes politiques ne peuvent pas s’en émanciper.
Au-delà de ces trois axes, les projets qui solliciteront cette opération du labex SMS sur lesmondes politiques contemporains devront respecter quelques uns de ses postulats. Il s’agira d’abord de privilégier des enquêtes de terrain qui mobilisent au-delà des sous-champs disciplinaires une véritable inter-disciplinarité en réinscrivant ainsi les objets dits « politiques » dans des perspectives plus réalistes donc plus larges. Il s’agira également de rappeler que les mondes politiques, sans doute beaucoup moins que les autres mondes sociaux, ne sont pas atomisés, selon une logique de choix rationnel que des individus libres et mobiles feraient sur des « marchés », qu’ils soient électoraux, administratifs ou militants ; en effet, les mondes politiques restent fortement structurés par des collectifs, plus ou moins institutionnalisés et organisés, mais néanmoins irréductibles à la somme des individus qui les composent.